Paul Déroulède (1846-1914)

Surtout connu pour les Chants du soldat (1872), poèmes dans lesquels il exprime un patriotisme intransigeant et glorieux, Paul Déroulède est dominé toute sa vie par l’idée de revanche sur l’Allemagne. Après avoir participé à la guerre de 1870 où il est fait prisonnier, il s’évade de Breslau, reprend du service dans l’armée de Bourbaki, est blessé une première fois par l’ennemi prussien, puis une seconde fois aux côtés des versaillais contre les communards. Dès lors Paul Déroulède devient l’un de ceux qui regardent vers la ligne bleue des Vosges et vers les provinces perdues d’Alsace et de Lorraine ; fondateur de la Ligue des patriotes en 1882, il est élu député en 1889. Partisan d’une République pure et dure, il soutient en vain l’action incertaine du général Boulanger, dénonce les scandales de la IIIe République naissante, notamment celui de Panamá, ce qui lui vaut un duel célèbre avec Clemenceau. Si Déroulède est un homme fougueux, connu pour ses répliques, ses discours et ses formules tranchantes, il a compris, l’un des tout premiers, l’importance d’une alliance entre la France et la Russie ; dès 1886, il se rend lui-même dans ce pays pour expliquer l’intérêt d’un axe Paris-Saint-Pétersbourg à des interlocuteurs méfiants. Tout en continuant à rédiger ses œuvres patriotiques, notamment Marches et Sonneries (1881), Chants du paysan (1894), et deux drames pour le théâtre Messire Du Guesclin (1895) et La Mort de Hoche (1897), Paul Déroulède persiste à s’opposer à une République parlementaire qu’il juge défaitiste. Aux funérailles de Félix Faure en 1899, il tente sans parvenir à le convaincre d’entraîner le général Roget à l’Élysée pour prendre le pouvoir. Traduit en cour d’assises, il est acquitté ; arrêté à nouveau, il est jugé par la Haute Cour et condamné, en 1900, à dix ans de bannissement. Il en passe cinq en Espagne, revient en France après l’amnistie de 1905.

Dès lors, Paul Déroulède se retire à Langély (dans notre commune de Gurat) où il entreprend la rédaction de ses ‘Feuilles de route’. Cependant, peu à peu, il se retrouve laissé de côté par les nouveaux nationalistes qui (comme l’écrivent les frères Tharaud) « pensent comme lui mais refusent d’admirer les moyens dont il s’est servi ».

Et, jusqu’à sa mort, à Nice en 1914, quelques mois avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il anime la Ligue des patriotes et préside des cérémonies du souvenir à Paris, devant les statues de Strasbourg et de Jeanne d’Arc.